(Projet AA) Whirlwind Mk. I, 263 Sqn., George Wood, Morlaix-Ploujean, 23 septembre 1943

Bonsoir,

Je vais commencer par vous raconter une histoire. Excusez-moi par avance, c'est un peu long...


Le 23 septembre 1943, le Flight Sergeant George Wood, participe au Ramrod 85 sur l’aérodrome de Morlaix-Ploujean, vers 12h00. Arrivé au 263 RAF Sqn. en février et opérationnel depuis le 18 juillet, il s’agit là de sa dixième mission.

L’objectif est de bombarder le terrain afin de faire décoller la chasse allemande, de manière à l’amener à portée des Spitfire du 610 Sqn. qui accompagnent les Whirlwind. George Wood pilote ce jour-là le Westland Whirlwind P7113 codé HE-W, qui est la monture attitrée du Squadron Leader Ernest Reginald Baker, le commandant du 263. Ce détail a son importance pour la suite de l’histoire…

L’attaque se fait classiquement par un piqué commençant à 14000 pieds (4267,20 m). George Wood vient tout juste de larguer ses deux bombes de 250 lbs (113,4 kg) à 4000 pieds (1219,20 m) lorsque son avion est ébranlé par une énorme explosion (une des bombes a été touchée par un obus de Flak…). Le témoignage d’un pilote de Spitfire évoque l’éclosion d’une fleur, et l’ailier de Wood, Iain Dunlop, pour qui il s’agit de sa première mission de guerre, se rend compte que, je cite : « Bloody hell, this is a dangerous job ». Les restes de l’avion descendent lentement vers la terre, mais aucun parachute n’est vu par les différents témoins de la scène. De fait, Wood est porté disparu au retour de la mission, et le S/L Baker consigne avec regret la perte de son pilote, se consolant en pensant que Wood n’a pas eu le temps de se rendre compte de sa fin.



Mais George Wood s’en est sorti ! Dès le choc, il a tenté de s’extraire de l’avion, hélas la verrière coulissante est coincée. Il s’escrime vainement dessus, et de désespoir finit par en appeler à Dieu… Et là, par miracle la verrière s’ouvre enfin et il saute. Un soldat allemand lui tire dessus lors de sa descente en parachute, heureusement sans le toucher. Il atterrit aux abords de l’aérodrome, du côté de la rivière de Morlaix, non loin du village de Ploujean. Il se débarrasse aussitôt de son équipement de pilote et s’éloigne rapidement de son point de chute. Car la traque a déjà commencé, et avec des moyens énormes puisqu’il apprendra plus tard que pas moins de 900 hommes ont été dépêchés pour le capturer. La raison en est qu’on a retrouvé un panneau de l’avion portant l’inscription « Lochinvar », qui est aussi l’indicatif radio de Reggie Baker, bien connu des Allemands : Sans doute le fanion de Squadron Leader figurait-il également sur le panneau retrouvé. Wood est pris pour un VIP !



Lors de sa fuite, il traverse sans le savoir un champ de mines, pique une pomme dans un verger et se réfugie dans un pin, sous lequel viennent griller une cigarette deux soldats allemands… Le soir venu, après avoir tenté de traverser la rivière de Morlaix puis renoncé après s’être envasé jusqu’à la taille, il retourne vers une ferme qu’il a aperçue plus tôt dans la journée. C’est là qu’il est accueilli par le fermier, qui contactera un résistant de sa connaissance, le capitaine Marzin. Celui-ci l’emmène dans un premier temps dans la petite ville côtière de Carantec, où il est hébergé par le docteur Le Duc, un résistant local. Cependant, les Allemands savent qu’un réseau d’évasion est actif dans la localité, et se montrent si vigilants que la situation de George Wood devient rapidement intenable. Il est bientôt de retour à Morlaix, logeant chez le capitaine Marzin. Il y passera plusieurs jours, apprenant alors quelques mots de français avec l’aide de la fille de la maison. Il arrive ainsi à dire assez correctement cette phrase étrange : « Avez-vous la bière pour le facteur ? ».



Les résistants français ont été actifs : fin octobre, George Wood est en possession d’une carte d’identité faisant de lui un étudiant nommé Pierre Floch, et son évasion par mer est programmée via le réseau Sibiril-Alliance. Les frères Ernest et Léon Sibiril sont, avec leur père Alain, propriétaires d’un chantier naval réputé pour la qualité de ses bateaux de plaisance. Dans la France occupée, tous les bateaux sont recensés et contrôlés par les autorités allemandes, aussi leur utilisation est impossible pour une quelconque utilisation clandestine… Les Sibiril contournent ce problème en restaurant des épaves déclassées ou en construisant des bateaux pour l’occasion. C’est ainsi que pour leur 15ème opération, le Requin, un cotre de 5,80 m, est construit en 11 jours (et nuits), à la barbe des Allemands pourtant postés non loin du chantier. Et le 31 octobre, vers 23h45, le Requin appareille à l’aviron dans la Penzé, le ria qui borde Carantec, passe l’île Callot et déploie progressivement ses voiles, et au bout de deux heures seulement, le moteur est mis en marche… Et après 21 heures de mer, Plymouth accueille les huit passagers du bateau, dont les frères Sibiril (rester à Carantec devenant pour eux bien trop risqué). Une dernière évasion sera toutefois effectuée le 14 février 1944 à l’instigation d’Alain Sibiril, le père d’Ernest et Léon.





Le 2 novembre, deux messages personnels sont diffusés sur la BBC : « Les requins du Pacifique, Emile, Noël et leurs amis, sont bien arrivés le 21 » et « Avez-vous la bière pour le facteur ? »…

C’est ainsi que George Wood peut rejoindre le 263 Sqn. dès le mois de janvier 1944. Il pilotera désormais un Typhoon, la conversion ayant eu lieu en décembre. Il n’est pas arrivé les mains vides, puisqu’il a emporté un souvenir : la pancarte de la Feldgendarmerie de Morlaix, escamotée pour lui par le docteur Le Duc. Cette pancarte décorera désormais le mess du squadron !



Après 47 missions sur Typhoon, George Wood sera nommé instructeur en OTU puis envoyé à Karthoum pour tester le Tempest II sous climat tropical, et terminera sa carrière militaire comme Flight Lieutenant. En 1954, il sera ordonné prêtre dans l’Eglise anglicane, vocation qui n’est pas étrangère à l’expérience vécue lors de l’évacuation de son Whirlwind, selon ses propres dires…



George Wood est toujours vivant et est plusieurs fois revenu à Carantec, la dernière en juin 2012. Il a raconté son histoire dans le passionnant ouvrage de Robert Bowater, "263 and 137 Squadrons, the Whirlwind Years", paru en 2013. C’est ma source principale dans le récit que je viens de vous faire. Les photos ont été prises cet été dans le petit musée maritime de Carantec. Ma famille bretonne étant originaire à la fois de Ploujean et de Carantec, je ne pouvais que me passionner pour cette aventure dont je connais parfaitement le cadre...


Vous aurez compris quelle maquette je vais monter, je suppose... Il s'agit du récent kit Trumpeter au 1/48, dont on a pu récemment admirer le superbe montage d'Eric Etchegaray. J'espère arriver à sa hauteur...

A très bientôt pour le démarrage !

Pascal

Superbe témoignage, je m'installe pour suivre ta réalisation

Bel hommage !
Merci de nous avoir fait partager cette histoire.
Vivement ton montage. demon7

Un bien bel hommage, au pilote et à tous ceux qui ont rendu possible son évasion.
Un montage à suivre absolument.

Bon montage Pascal, merci pour cette belle histoire.

Mushu17 a écrit:Bel hommage !
Merci de nous avoir fait partager cette histoire.
Vivement ton montage. demon7

Salut!
+1!
Ciao
IWik

J'adore ce type d'histoire!!.. c’est passionnant.
On dirait une histoire tout droit sortie de la bouche d'un romancier, alors que c'est bel et bien une vérité historique!...
Je vais suivre avec interet!

Me voilà déjà avec un public nombreux...  J'ai intérêt à assurer, moi ! En tout cas, je suis heureux que ce sujet vous plaise.

Cela fait quelques années maintenant que je projetais le montage de cet avion, mais j'ai eu beaucoup de mal à trouver un kit, jusqu'à cette année seul le Classic Airframes pouvait - difficilement - se trouver, et aussi le Cooper Detail en vacu... J'ai ces deux kits, mais j'avoue que le Trumpeter me semble plus à ma portée, et comme Barthe m'en a confié un exemplaire lors de mon passage à Chateaubriant, je joins l'utile à l'agréable : cette maquette est pour le Projet AA ! :thumleft:

Pascal

Super histoire comme on aime ! :thumleft:

Je vais moi aussi suivre avec grand intérêt

Bon montage
nico

Merci pascal
Voilà le pourquoi   j’ai vous est entraînez dans ce projetAA et en voici un beaux témoignage  pour rendre honneur à nos pilotes  et a se pilote particulièrement. Il nous en manque beaucoup de ces beau témoignage pour n’importe type d’avion. Je suis très émut, et je te remercie beaucoup  Pascal de ce témoignage, et une bonne construction

Belle histoire en vérité et très émouvante.

merci beaucoup de cette page d'histoire et bon montage que je suivrai ne connaissant pas cet avion.

Je m'installe pour suivre le montage de cette maquette de ce Wirlwind du projet AA.

A+ Philippe.

Bonjour Pascal, voilà une bien belle histoire qui vous ferait retrouver confiance en l'être humain. Nul doute que tu nous produises une belle maquette. La démarche l'est déjà.
Bon montage.

André.

En voilà un qui fait couler beaucoup d'encre, au propre et au figuré! une belle histoire comme on aime, avec une fin heureuse!
quant au montage, il sera superbe nul doute!
C'est plaisant de voir le dio se compléter peu à peu avec des avions peu connus du grand public. çà ne le rendra que plus attractif. bon chantier!
ne reste plus qu'à faire le côtre "Le Requin" pour que l'histoire soit reconstituée!

Très belle mise en bouche Pascal, une très belle histoire !!!

Vivement le début du montage !!!

Une bien belle histoire que tu as raconté avec brio!
Bon montage Pascal

Un montage qui prouve que nos petits bouts de plastique sont bien plus qu'un hobby et que l'Histoire et les histoires servent d'inspiration à nos maquettes.

Vivement le début du montage PascalG!

Salut Pascal, merci pour la succulente histoire de ce sacré bonhomme, et bon montage!

Récit très intéressant
Je prends un siège (s'il y en a encore.. ) pour ton montage

Merci à vous tous, si nombreux... Je vais essayer de me montrer digne de votre intérêt.

Pour l'histoire, je ne fais que rapporter des faits, de simples faits. Il se trouve que cette histoire particulière a tout pour me toucher : le lieu, que je connais depuis mon enfance, l'avion, qui est l'un de mes avions favoris (sinon LE) et l'homme, dont la modestie le dispute à l'humour (sur un forum britannique, on trouve un texte de lui qui commence par "I'm not a gentleman but a clergyman"...). Pour moi qui suis historien de formation, cela est très inspirant et justifie mon approche de la maquette.

cuttysark25 a écrit:Je prends un siège (s'il y en a encore.. )

Il en reste quelques uns... Je vais chercher des tabourets, au cas où !

Eric, je crois effectivement connaître assez bien cet avion désormais, et j'ai repéré quelques défauts sur le kit Trumpeter (nous en avions déjà fait le tour lors de ton montage). Cependant, vu mon rythme et le délai prévu pour la livraison à Barthe et François, je crois que je vais zapper certaines corrections qui demanderaient un peu trop de travail. Autrement dit, ce sera plutôt un montage "sorti de boîte"...

A très bientôt pour le début effectif de ce montage !

Pascal

Allez, c'est parti !

Tout d'abord, je vous présente trois ouvrages qui m'ont bien aidé à connaître l'avion, son utilisation, et les deux Squadrons qui l'ont employé :



Je vous fais grâce des différentes monographies consacrées à l'appareil (Warpaint, 4+, Kookabura, Profile, etc.), je les ai toutes... Je vais tout de même citer la dernière en date, parue cette année, celle de Valiant. Un document indispensable pour connaître tous les détails techniques de l'avion.

Bien ! J'ai attaqué en suivant la notice, donc par le poste de pilotage. Pour le moment, j'ai juste fait un peu de peinture :



Ce n'est pas grand-chose, mais au moins le montage est officiellement commencé !

A très bientôt,

Pascal

Bonsoir Eric,

Non, je ne pense pas, parce qu'on ne doit pas y voir grand-chose au final, non ? Peut-être le volant de trim, histoire de meubler l'axe qui est représenté... mais bon.

Pascal

Un montage intéressant car teinté d'histoire, je prends un tabouret puisqu'il ne reste plus que çà